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lundi, 09 février 2009

Un duel sous Henri III. - N°6

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   Ce dessin au fusain représente l'issue du duel qui eut lieu le 27 avril 1578 à Paris entre trois mignons du roi et trois mignons du duc de Guise. Deux gisent morts sur le terrain, deux autres, dont Jacques de Caylus favori du roi, mourront de leurs blessures, un cinquième est grièvement blessé à la tête. Seul Charles d'Entragues reste debout très légèrement blessé. Le sujet de mon propos n'est pas de décrire ce combat pour l'honneur d'un prince, particulièrement meurtrier, tellement bien écrit par Alexandre Dumas dans la Dame de Montsoreau,  mais d'étudier la mentalité de ces hommes dans le contexte de cette époque brutale de notre histoire, l'utilisation d'armes blanches alors particulièrement redoutables, sans comparaison avec les armes blanches d'aujourd'hui ainsi que quelques réflexions sur le vêtement masculin de l'époque.

   La guerre de Cent ans, terminée depuis plus de cent vingt ans, avait obligé la société seigneuriale française à éduquer les enfants mâles dans la perspective d'en faire des guerriers accomplis, rompus dans l'exercice des armes et de l'équitation. Le temps des tournois était passé de mode depuis la mort brutale de Henri II mais l'arme blanche était un passage obligatoire afin de permettre aux jeunes gens de sang noble de défendre leur droit et l'honneur, issu de l'esprit de la chevalerie, de leur famille ou de leur suzerain (souverain). Ces hommes, sans être incultes, mettaient en priorité le métier des armes auquel ils s'exerçaient quasi quotidiennement sous l'enseignement des meilleurs maîtres d'arme d'Europe, apprenant les techniques les plus sophistiquées venues d'Italie, d'Espagne ou de Bohême ce qui pouvait prendre l'adversaire par surprise. Le coup de Jarnac pour défendre l'honneur de François Ier en était un éclatant témoignage alors que son adversaire lui était supérieur en combativité. L'éducation culturelle et musicale n'était pas leur fort, réservée aux jeunes filles qui devenues femmes pouvaient avoir une bonne influence sur leurs époux. Par contre, dans le souci de plaire au cours des nombreux bals que donnait notamment la reine-mère Catherine de Médicis, venue en France avec une immense fortune et le goût italien, ces jeunes gens de bonne famille se dépensaient sans compter dans leurs parures vestimentaires, le plaisir de la danse mettant en valeur leur désir de paraître et montrer la puissance de leur corps sans ambiguïté. C'est à Michelet que l'on doit une image trouble et efféminée de ces hommes que l'on n'aurait pas aimer avoir comme adversaires dans un combat singulier à cette époque où tout était prétexte à de telles rencontres meurtrières : religion, parti pour un prince, amour, honneur public et privé.

   Pour ce qui est des armes blanches utilisées, il ne s'agit pas d'épées comme on l'entend aujourd'hui, mais de fortes rapières issues d'une longue évolutions d'armes d'hast qui permettaient aux piétons, dans les combats du Moyen-âge, de désarçonner les cavaliers protégés par leurs armures et de les égorger au sol. Ceci explique pourquoi ces terribles bretteurs combattaient avec une dague à main gauche, cette dague étant portée dans son étui, à la ceinture derrière le dos, arme sournoise par excellence puisque apparaissant le plus souvent lorsque l'adversaire ne s'y attendait pas, concentré sur son escrime faite de coups d'estoc et de taille découlant de la pratique de la pique et de la hache encore d'usage cent ans plus tôt.

   Il me faut aussi vous faire remarquer que le vêtement masculin de cette époque est parfaitement adapté au combat à l'arme blanche, l'ampleur des manches pour parer les coups aux bras, le justaucorps qui est comme un plastron de cuirasse avec son arrête médiane pour dévier l'arme vers la droite ou la gauche. Les hanches sont aussi protégées contre les coups de taille en biais. l'ensemble de ce vêtement est en quelque sorte la matelassure portée sous la demie armure en usage dans les batailles à cette époque. Les jambes sont libres pour une bonne aisance dans les mouvements. Les seuls points sensibles sont les mains le plus souvent protégées par des gants et le cou couvert par un simple collet montant ou la fameuse fraise plus décorative que protectrice mais que l'on peut voir, sur les tableaux, portées sur la cuirasse. Si on y réfléchit bien, l'expression se parer est à double sens, à savoir  paraître beau mais aussi se protéger des coups. C'est là tout l'esprit de cette époque équivoque.

   Dans l'album de ce dossier, que vous pouvez feuilleter ci-dessous,

vous pouvez voir, de 1 à 5, l'histoire d'un jeune seigneur agressé dans la rue par deux spadassins qui le provoquent. Son art de l'escrime lui permet aisément de surmonter l'agression sans aucun état d'âme pour la vie de ses adversaires mais en parfait praticien du combat individuel. On remarquera que sa cape tout à fait à la mode lui sert de moyen de protection en l'enroulant autour de son bras ou en s'en servant comme une cappa de toréador. Suit ensuite une histoire d'honneur pour une dame calomniée, qui se résout par un duel à finalités multiples dans l'esprit de ce temps où l'élégance côtoie la mort et le sang versé et qui nous paraît aujourd'hui absurde. Autre temps, autres mœurs !!!

   Bien cordialement à tous ceux qui me lisent et regardent mes œuvres.

        Alain de JENLIS